Cinéma Culture

Une Sirène à Paris, de Mathias Malzieu : un retour à l’émerveillement dans les salles

Adaptation du roman éponyme, Une Sirène à Paris, second film de Mathias Malzieu, chanteur du groupe Dionysos, était sorti au cinéma le 11 mars 2020. Néanmoins, la crise sanitaire, entraînant la fermeture des salles, a écourté la durée d’exploitation de ce long-métrage. Celui-ci bénéficie d’une ressortie dans les salles obscures dès le 22 juin, ce qui offre l’occasion de le découvrir. Malzieu met en scène une romance particulière entre un crooner au cœur brisé (Nicolas Duvauchelle) et une sirène au chant d’amour mortel (Marilyn Lima). Après Jack et la mécanique du cœur (2013), le musicien-romancier tente à nouveau le même processus créatif, en passant par l’écriture d’un roman, puis à la composition d’un album et la réalisation d’un long-métrage – cette fois-ci en prises de vue réelles. Pari réussi ?

Le long-métrage possède une ambition notable : au-delà d’une histoire fantastique se reposant sur la confrontation entre deux mondes opposés, son postulat est de mettre en scène une impression de réalisme magique à l’écran. Pour ce faire, le réalisateur multiplie différentes approches. Il utilise tout d’abord les décors comme des espaces imprégnés d’une énergie singulière. L’appartement du personnage principal se fait presque décor de théâtre au fil des interactions comiques entre ses habitants, tandis qu’une péniche, lieu de création à la nuit tombée avec ses cabarets hauts en couleurs, rend hommage aux Années folles, période d’activité artistique marquante en France. Ce foisonnement visuel s’accompagne d’un mariage entre plusieurs techniques (ouverture en animation image par image, maquettes) et la prédominance d’un aspect musical. S’il accuse d’un souci de rythme en termes de structure, étirant souvent certaines séquences, le long-métrage construit une imagerie évocatrice de tout un héritage culturel français, allant des trucages de Georges Méliès à l’utilisation fréquente de  courtes focales dans les réalisations du duo CaroJeunet. De l’intronisation du fantastique au sein du monde réel, l’équipe d’Une Sirène à Paris en fait un spectacle vivifiant, orné de trouvailles visuelles traduisant une poésie du quotidien à la manière de Boris Vian. Ayant parrainé le centenaire de l’auteur de L’écume des jours (1947), Mathias Malzieu réinvestit cet esprit lyrique, voire surréaliste, pour le placer au cœur de la transmission de la passion, thème fondateur du roman. Œuvre au processus créatif fascinant dialoguant entre plusieurs médias, Une Sirène de Paris constitue une création débordante d’énergie autant qu’une ouverture vers le merveilleux dans le paysage du cinéma français.

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