Musique

Scott Bradlee et Postmodern Jukebox

Le principe de Postmodern Jukebox est simple : il s’agit de reprendre un chanson récente, en l’habillant de sonorités vintage. La variété des styles, le caractère incroyable des chanteurs et le souci du détail ont assez rapidement fait un phénomène de ce qui a commencé comme une chaîne You Tube. Voilà pourquoi nous avons absolument tenu à rencontrer Scott Bradlee, à l’origine de cette idée géniale.

Scott Bradlee & Postmodern Jukebox

Cette chaîne You Tube est complètement addictive. On peut y passer des soirées entières sur Postmoderne Jukebox, à naviguer entre les titres sans jamais se lasser. On ne se contente pas d’en écouter la musique, d’ailleurs. Les costumes des protagonistes ajoutent à l’ambiance. Et on n’est pas à l’abri de quelques surprises. Comme lorsqu’on voit Hannah Gill et Casey Abrams entamer un slow lors d’une partie instrumentale de la reprise jazzy de Crazy, de Gnarls Barkley. Pourtant, on est plus habitué à voir le second, un géant à la chevelure abondante, bondir autour de sa contrebasse.

Et il y a aussi ces artistes qui parviennent à donner une couleur complètement inédite au titre qu’ils interprètent. Haley Reinhard vous flanque véritablement le frisson lorsqu’elle reprend Creep, de Radiohead. On en vient à se demander comment une fille aussi menue peut avoir une telle profondeur dans la voix. On est ébahi par les aigus de Von Smith, dans son interprétation de Halo, de Beyoncé. Et les interventions de Puddles Pity Party, ce clown immense à la chaude voix de basse semblent totalement surréalistes. Les personnalités, les arrangements, les talents, le choix des titres… Tout cela se retrouve également sur scène. Il s’agit d’un véritable show à l’américaine, où le glamour des robes qui se succède a pour seul égal la maîtrise nécessaire pour tenir un spectacle sans filet.

Derrière toutes ces reprises et ces vidéos, on trouve l’idée d’un homme : Scott Bradlee. Le chef d’orchestre (et surtout pianiste) de Postmodern Jukebox a su donner corps à ce qui n’était au départ qu’un délire d’étudiant. Elégant comme rarement le sont les américains dans un costume en lin clair, nous l’avons rencontré à Paris, où il nous a raconté la genèse de ce projet à l’heure où sortait la version française de leur album.

Si tu devais te présenter en quelques mots… ?

C’est moi qui ai créé Post Modern Jukebox, il y a maintenant cinq ans. C’est un mélange d’ancienne soul et de pop moderne. J’ai commencé à devenir artiste en jouant du piano dans les bars de New-York, puis je suis passé à You Tube.

Comment a débuté Post Modern Jukebox ?

A l’école. J’aimais alors les musiques retro, tandis que mes camarades préféraient la pop. J’ai décidé de combiner les deux, ça a commencé comme une plaisanterie. Mais ça sonnait pas mal. Du coup, à New-York, j’ai commencé à jouer mes transformations de Bon Jovi, Madonna, Teh Police et d’autres. Puis le Medley est devenu viral. Du coup, j’ai commencé à travailler les arrangements, à faire appel à des chanteurs. C’est devenu encore plus viral ! C’est ensuite parti assez vite. Les premiers enregistrements étaient assez typés jazz des années 1930. Puis en 2015, on a enregistré Creep, avec Haley Reinhart, ce qui a encore fait grimper les vues (la vidéo compte aujourd’hui plus de 48 millions de vues, NDLR). Puis l’arrivée de Puddles Pity Party, notre clown qui chante, a été une autre étape.

Comment avez-vous mis au point l’esthétique de vos vidéos ?

Comme pour nos chansons, c’est un mélange d’aspects modernes et vintage. J’aime l’esthétique des années 1920 et 1930, ça a guidé le choix des costumes et accessoires. Nos premiers enregistrements ont eu lieu dans un tout petit appartement, puis dans une maison, avec heureusement un peu plus d’espace. On a ainsi eu plus de liberté !

Postmodern Jukebox - The Essentials

Postmodern Jukebox – The Essentials

Une bonne part des chanteurs de Post Modern Jukebox viennent de la télé réalité. Pourquoi ?

C’est presque un hasard. J’ai déménagé à Los Angeles et je suis tombé sur Haley (Reinhart) et Casey (Abrams) qui étaient juste incroyables. American Idol est une excellente école, qui vous apprend comment faire un show. Et comme Post Modern Jukebox se passe avant tout sur scène, c’est parfait !

Comment Post Modern Jukebox est accueilli en France, par rapport aux US ?

A chaque fois que nous faisons un spectacle ici, il y a un véritable engouement. On sent qu’il y a une véritable culture à Paris, une compréhension des racines musicales.

Préfères-tu Post Modern Jukebox sur scène ou lors de enregistrements studio et vidéo ?

Pour la plupart d’entre nous, la vie c’est avant tout le studio. La scène, c’est l’occasion de recueillir les réactions du public, d’interagir avec notre audience et de s’amuser, que ce soit aux Etats-Unis ou partout ailleurs dans le monde. Jouer en live nous donne vraiment de l’énergie.

Notre magazine s’appelle Save My Brain… Sauver les cerveaux. Comment peut-on le faire ?

Il faut au maximum chercher à apprendre ce qu’il se passe dans le monde, pour emmagasiner de l’expérience, de la sagesse. Avant Post Modern Jukebox, je n’aurais jamais imaginé pouvoir autant le faire. Je n’ai jamais quitté mon pays avant l’âge de 30 ans. Et maintenant, j’en ai visité 70 ! Le monde est intéressant car il vous apprend quelque chose de nouveau chaque jour. Il faut se donner des challenges.

Peux-tu nous parler des tes derniers coups de cœurs culturels ?

Je passe ma vie dans les avions, si bien que j’en oublie de prendre le temps. Mais si je pense à quelque chose de récent, ce serait Hamilton. C’est une comédie musicale hip hop sur les pères fondateurs de l’Amérique. C’est une façon très cool de raconter l’histoire. Et c’est ce que doit avant tout être un artiste : un conteur d’histoires.

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