Chanteuse rock

Nina Hagen

Avec des groupes comme Scorpions, Rammstein ou Tokio Hotel, le rock allemand, dans son sens large du terme, compte quelques icônes internationales. Mais la plus grande artiste du genre reste sans aucun doute Nina Hagen, car la première à avoir bravé la tradition selon laquelle le rock ne se chantait qu’en anglais. Le drolatique et mythique tube « Du hast den farbfilm vergessen » (1974) ouvre la voie et quelques années plus tard c’est la consécration pour la walkyrie punk, autoproclamée « Mère du Punk », avec les albums Nina Hagen’s Band (1978) et Unbehagen (1979). NunSexMonkRock (1982) signe quant à lui le début d’une carrière solo en dents de scie, les déclarations chocs de la diva déjantée desservant son image publique. Retour à une apparente normalité à la fin des années 90 avec sa participation à de nombreux projets artistiques. Le dernier en date ? Son album Personal Jesus sorti le 16 juillet dernier, annonciateur d’un nouveau cheminement spirituel !

Pellicule noir et blanc

Nina, de son vrai nom Catherina Hagen, naît le 11 mars 1955 à Berlin-Est, en pleine période du Mur de Berlin. Avec une mère actrice (Eva Maria) et un père scénariste (Hans) qu’elle ne connaîtra que très peu, le cinéma est un peu son milieu naturel. Auquel viendront bientôt s’ajouter la poésie et la chanson, sa mère se remariant avec l’auteur-compositeur-interprète Wolf Biermann, figure de proue de la dissidence Est-Allemande, dont l’influence sera pour elle déterminante. Ado politisée et rebelle, Nina quitte l’école à 16 ans et après avoir raté son examen d’entrée à l’école gouvernementale d’acteurs, celle-ci intègre l’orchestre Fritzens Dampferband en reprenant des titres de Janis Joplin ou Tina Turner.

Sa carrière décolle avec le groupe Automobil pour qui elle interprète le mythique « Du hast den farbfilm vergessen », tube phare de l’année 1974. Valeur montante de la chanson allemande, la jeune vedette voit déjà le succès lui échapper à l’annonce de l’expulsion de sa famille hors de la RDA. Contrainte à l’exil en 1976, celle-ci s’installe côté RFA, signe avec une filiale de la maison de disques CBS et part découvrir le milieu punk londonien, rencontrant les Slits et les Sex Pistols (ndlr : Johnny Rotten devient même un de ses fans). De retour à Berlin Ouest, Nina forme son premier groupe : Nina Hagen’s Band suivi d’un disque éponyme distribué en 1978…

Un album hard rock écrit exclusivement en allemand qui fait un effet bœuf sur le territoire national comme dans le restant du monde. Il est loin le temps des sages débuts de Nina rôdant ses premières scènes : désormais, Hagen la théâtrale est littéralement possédée par sa musique et n’hésite pas à effectuer d’impressionnantes pirouettes vocales, partant du cri étouffé au rugissement le plus féroce. Symptomatique des divergences faisant rage dans le groupe, Unbehagen (1979) est le deuxième et dernier album de Nina et sa bande d’où sera issu l’hymne punk « African Reggae ». Il est déjà l’heure pour la chanteuse de faire cavalier seul.


Bouddha, les ovnis et le rock n’roll

Ainsi libérée du carcan d’un groupe, la jeune femme s’autorise quelques débordements. Et pas des moindres, comme ce dérapage X dans une émission matinale autrichienne où celle-ci mime très explicitement le plaisir féminin solitaire de différentes manières… Tandis que l’Europe s’offusque, la punkette trash pose ses valises chez l’Oncle Sam, où naît sa fille Cosma Shiva en mai 1981. La maternité l’a-t-elle assagi ? On en doute avec la sortie de l’anglophone NunSexMonkRock moins d’un an après, furieux mélange de punk, funk, reggae et opéra, encensé par la critique !

Les excentricités de Miss Hagen ne s’arrêtent pas là : ses apparitions publiques sont plus pour elle, assez bizarrement, l’occasion de disserter sur ses opinions politiques et religieuses que de véritablement promouvoir ses albums. Celle-ci est d’ailleurs intarissable sur des expériences extraterrestres qui lui seraient « réellement » arrivées. Malgré tout cela, Angstlos / Fearless (1983) et In Ekstase / In Ekstasy (1985) sauvent la mise grâce au succès des titres « Zarah », « Universal Radio » ou les reprises de « New York, New York » et du « My Way » de Sinatra. Quant à l’album new wave-rap Nina Hagen sorti en 1989, celui-ci intronise un nouveau look Nina où les tenues sont aussi sexy que le maquillage outrancier !

En ce début des années 90, Hagen s’installe à Paris avec sa fille et Otis, son dernier-né. Son album Street (1991) et la tournée qui s’ensuit entendent renouer les liens de la chanteuse avec le Vieux Continent. Celle-ci s’essaye même à l’électro dance sur le titre de «Get Your Body » concocté par le producteur anglais Adamski. Rien n’y fait. Pas même la sortie de Revolution Ballroom (1993) et Freud Euch (1995) devenu Beehappy (1996) pour le marché anglophone. Il faudra attendre 1998 pour que l’album de chants religieux indiens Om Namah Shivay, commercialisé exclusivement en ligne, renoue les liens entre la star et son public.

Une réunion qui sera pleinement consommée avec le son punk de Return of the Mother (2000). C’est pleine d’une nouvelle énergie et le regard rivé sur d’autres horizons musicaux que la chanteuse aborde cette nouvelle décennie : Big Band Explosion (2003) sera l’opportunité de retrouver son mari, le chanteur danois Lucas Alexander, le temps de reprises swing. Heiss (2005), une compilation de ses plus gros tubes. Irgendwo auf der Welt (2006), une nouvelle parenthèse big band en compagnie du Capital Dance Orchestra.

Ton propre Jésus personnel

Pour tenter de cerner le mythe Hagen, il faut s’écarter de sa discographie pour regarder du côté de ses projets parallèles. Actrice dans l’underground Cha Cha (1979), Nina se fait présentatrice d’un show hebdomadaire de science-fiction pour la TV britannique courant 1998 avant de fouler les planches pour l’Institut Goethe et d’intégrer en 2006 le jury du Popstars allemand. Prêtant sa voix à Sally dans la version germanophone de L’Etrange Noël de monsieur Jack de Tim Burton, la diva la met également au service de l’hymne du club de foot FC Union Berlin et devient Celia Peachum pour une relecture de l’Opéra de Quat’Sous en 1999… Sans oublier son interprétation de l’hymne de l’Expo Universelle 2000 et sa reprise du « Seemann » de Rammstein avec le groupe de métal classique Apocalyptica !

Cette végétarienne, farouchement opposée à la vivisection et versée dans l’humanitaire n’est définitivement pas de celles que l’on enferme dans une case. Tellement difficile à suivre même qu’on pense au coup médiatique à l’annonce de sa conversion au catholicisme en août 2009… Car jusqu’ici, Nina suivait les principes de Bouddha. Une information confirmée par la sortie de son 12e album solo, Personal Jesus, dans les bacs depuis le 16 juillet dernier. Clin d’œil au célébrissime tube de Depeche Mode, qui se voit revisité façon gospel, le nouvel opus de la cantatrice punk est le témoignage musical de sa renaissance spirituelle à travers des standards rock (« All you fascists bound to lose » de Woodie Guthrie) sur fond de musique gospel.

« Je suis une chanteuse et musicienne passionnée et me réjouis de pouvoir travailler avec une maison de disques qui l’est tout autant. C’est une bénédiction audacieuse pour ma musique et je suis si heureuse de m’en sortir avec la cinquante triomphante. C’est si appréciable d’avoir une nouvelle maison de disques qui estime que certains artistes deviennent, comme le bon vin, meilleurs avec le temps ». (http://www.popinstereo.com). Ce nouveau label dont il est question est Koch Universal Music et à priori celui-ci a bien compris comment mettre en valeur ce qui reste au final le plus bel organe de Nina : sa voix de prima donna.

(Les photos proviennent du site http://www.myspace.com/ninahagenrocks)

Sources

Sites internet :
–    http://www.beepworld.de/members77/ninahagendas
–    http://www.personaljesus.de
–    http://www.myspace.com/ninahagenrocks
–    http://www.evene.fr
–    http://fr.wikipedia.org
–    http://en.wikipedia.org

Articles :

–    Nina Hagen : « Personal Jesus » et des concerts en Europe : http://www.musiqueradio.com/article_news9645_nina-hagen–personal-jesus-et-des-concerts-en-europe.php
–    Nina Hagen reveals Personal Jesus tracklist : http://www.popinstereo.com/?p=3865
–    Nina Hagen a rencontré Dieu et elle l’écrit… : http://culture.france2.fr/musique/actu/Nina-Hagen-a-rencontr%C3%A9-Dieu-et-elle-l-%C3%A9crit…-60018112.html
–    Heureux qui comme Nina… : http://chroniques-lc.blogspot.com/2009/11/nina-hagen-1996.html
–    NunsexMonkRock / Nina Hagen Band : http://allmusic.com/cg/amg.dll?p=amg&sql=10:0ifwxqu5ldfe

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3 Comments

  • Reply
    Manue
    21 janvier 2011 at 13:24

    Une femme qui a révolutionné le milieu punk rock et a apporté beaucoup à la musique par sa façon particulière de chanter, sa personnalité complètement déjantée et audacieuse. Une femme-artiste provocatrice, passionnée et talentueuse :)

  • Reply
    Angéline
    9 septembre 2010 at 18:17

    J’adore !

  • Reply
    Sekhmet
    3 septembre 2010 at 14:12

    J’ai toujours adoré Nina … mais bon probablement du au fait que j’ai du sang teuton !

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