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Le Redoutable de Michel Hazanavicius : portrait haut en couleurs d’une redoutable figure du Cinéma français

L’importance du sujet

Michel Hazanavicius, connu pour la série OSS 117 (Le Caire, nid d’espions en 2006 et Rio ne répond plus en 2009) et The Artist (2011), hommage au cinéma muet des années 20, porte sur grand écran un film retraçant la liaison amoureuse entre Jean-Luc Godard et sa compagne Anne Wiazemsky, petite-fille de François Mauriac et rôle principal de son film La Chinoise, en 1967. Adapté du roman Un an après écrit par Wiazemsky et paru en 2015, le long-métrage d’Hazanavicius pourrait ressembler à un biopic sur le cinéaste réputé durant la Nouvelle Vague des années 60. Or, la subtilité du film se trouve dans la juxtaposition de sujets : sur fond de Révolution de Mai 68, Hazanavicius aborde une histoire d’amour en même temps que le portrait d’un artiste révolutionnaire qui va jusqu’à détruire les propres codes de sa mise en scène.

Le mépris d’un cinéaste reconnu à bout de souffle

Cinéaste reconnu pour sa vision anticonformiste du Cinéma français, Jean-Luc Godard est montré comme un personnage exubérant et révolté face à une remise en question de son art. Conscient de sa gloire, il se permet de remettre en question les avis de son entourage. Ce comportement cynique fait de lui un personnage original à part entière qui, dû à son humeur changeante, apparaît tour à tour drôle et énervant à la fois. Face à cet artiste caustique, s’interpose le point de vue de sa compagne Anne Wiazemsky, jeune actrice remplie d’espoir. L’alchimie entre ces deux personnages au caractère opposé, magnifiquement illustrée par les interprétations de Louis Garrell, méconnaissable en tout point, et Stacy Martin, actrice britannique aussi charmante que talentueuse, apporte une dynamique électrique au film. Passant de la comédie cinglante au drame touchant, le long-métrage arrive à ménager ces ambiances avec parcimonie et crée un portrait atypique de cette liaison. La réalisation se montre à la fois soignée et ludique. Hazanavicius se plait à reprendre avec malice les techniques de réalisation expérimentées par Godard. Ce parti-pris donne lieu à une mise en scène véritablement ingénieuse, travaillant l’image avec soin et offrant même par instants des trouvailles humoristiques très bien pensées comme des allusions ironiques (les titres des livres de Godard reflétant son état d’esprit) ou des actions surréalistes (la machine à écrire qui prend vie). Le film devient hybride : entre une réalisation classique et expérimentale, entre un humour subtil et loufoque, il constitue une réflexion sur l’image de l’artiste à la fois divertissante et pertinente.

Avec Le Redoutable, Michel Hazanavicius offre un film virtuose sous forme d’une mise en abyme cinématographique inventive. Son nouveau long-métrage, présenté comme une comédie romantique, se révèle être un portrait à charge sur la figure de l’artiste, aussi drôle que profondément mélancolique. Bien plus qu’un biopic traditionnel sur Godard, Hazanavicius construit une narration cinématographique ludique et prenante, en donnant toujours la part belle à sa galerie de personnages. Malin dans sa réalisation et percutant dans ses dialogues, Le Redoutable est une véritable réussite à voir sur le grand écran.

 

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1 Comment

  • Reply
    sylvainfoulquier
    26 septembre 2017 at 12:42

    Autant j’ai détesté About de souffle et Le Mépris, qui ne m’ont pas ému le moins du monde, autant j’ai adoré Alphaville (avec Eddie Constantine et Anna Karina) un film souvent incompris, avant-gardiste et qui n’a pas pris une ride. Un hymne sublime à l’amour fou et à la poésie. Depuis je dois dire que Godard est fortement remonté dans mon estime, et le cinéma français contemporain me semble bien pauvre en comparaison de ce qu’il faisait à l’époque d’Alphaville et Pierrot le fou.

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