Les mails au bureau

L’arrivée de l’informatique a été une révolution dans le monde du travail. Pas tant grâce au traitement de texte… Après tout, une bonne vieille machine à écrire permet d’obtenir aussi un document propre. Mais ce qu’une Olivetti ne sait pas faire, c’est envoyer un mail. Et ce moyen de communication aussi discret que rapide est tout de même un fichu progrès en même temps qu’un fichu perturbateur. Mais aujourd’hui, qui peut travailler sans ?

9h00

Vous arrivez à votre bureau. Premier réflexe, allumer votre ordinateur favori (ou pas, vu qu’il lui arrive de planter avec une bête présentation Power Point et qu’à ce moment-là, vous n’avez qu’une envie : le balancer par la fenêtre). Une pause café le temps que tout démarre et vous attaquez le tri de votre boîte mail. En fait non, de VOS boîtes mail. Parce qu’il y a celle du boulot et celle(s) perso(s) sans compter celle de Facebook. « La première traite du matin, c’est la première traite du matin » disait une pub. Eh bien là, c’est pareil. Anna Gavalda parle de traire sa boîte mail, c’est un terme tout à fait approprié. Il faut enlever le trop plein : les pubs de chez Virgin, un œil rapide sur la newsletter de Vogue et hop, corbeille. A la corbeille direct, les lettres d’ebay ou de Easy Jet. Bon, dix de moins en un quart d’heure, c’est un bon rendement. Reste les indispensables, qui prennent du temps et auxquels il faut répondre : des investisseurs chinois qui veulent créer une édition Save My Brain Shanghai, une invitation à un vernissage d’expo, votre tante qui vous écrit que son yorkshire est constipé. Et là, ça prend plus de temps. Trois en un quart d’heure…

10h00

Vous commencez enfin à bosser. Enfin, entendons par là, vous commencez à traire votre boîte mail professionnelle. Les sujets sont ici un peu moins réjouissants que le reportage sur Louboutin que vous venez de découvrir grâce aux alertes sur votre boîte perso. Ici il est question de paperasses, de service qui se tirent dans les pattes et de rapports à rendre pour hier matin. Bon gré, mal gré, vous vous obstinez comme un âne de bât.

11h00

Vous venez de terminer le tri de vos mails professionnels et vous attaquez le rapport pour hier matin.

11h03

Un mail intitulé URGENT arrive sur votre boîte pro. C’est votre collègue Floriane qui a un problème insurmontable avec la photocopieuse. Vous descendez voir ce qui se passe et une fois la bécane débloquée, elle vous raconte son shopping du samedi après-midi.

12h00

Vous décidez de continuer la discussion shopping autour de sushis, d’un commun accord avec Floriane.

13h30

De retour du repas, le même scénario que ce matin se reproduit. Il faut procéder à la deuxième traite de la journée. Bien sûr le volume est moins conséquent, mais cela prend quand même un petit peu de temps…

15h00

Alors que vous avez réussi à avancer un quart d’heure sur le fameux rapport, vous recevez (sur votre boîte perso cette fois), un message de votre amie Hélène. Intitulé « Tu fais quoi ce soir ? », il ne laisse planer aucune ambiguïté quant à son contenu. Vous décidez aussitôt de répondre. Au bout d’un échange de 15 messages (chacune), vous tombez finalement d’accord sur une séance ciné.

16h00

Bravo, vous venez de travailler un quart d’heure sur votre rapport ! Comme pour vous féliciter, une alerte Facebook apparaît, vous invitant à aller voir le nouvel album photo de votre amie (enfin presque) Louise. Photos de vacances à Ibiza. Vous appelez immédiatement Floriane par la messagerie instantanée, pour qu’elle rapplique. Histoire de voir comment cette garce de Louise s’expose avec ses jambes et son bronzage parfaits.

16h30

Pause café

16h45

Votre ami Etienne vous appelle au secours (par mail, toujours) pour savoir ce qu’il doit mettre au mariage de sa cousine. Vous vous appliquez à faire une petite recherche et à lui envoyer les liens photos vers chaque pièce qu’il doit porter. Le conseil personnalisé vous prend un quart d’heure

17h00

Fichue chaleur ! Vous descendez boire un verre d’eau. En chemin, vous croisez votre patron qui vous pose une question sur une réunion à venir. Au bout d’un quart d’heure de discussions, il vous lâche un laconique « OK, envoyez-moi tout ça par mail »

17h20

Vous buvez votre verre d’eau

17h25

Vous envoyez le mail à votre patron

17H30

Il est temps de partir, si vous ne voulez pas louper votre séance de ciné avec Hélène. Vous avez travaillé aujourd’hui pendant exactement 33minutes sur votre rapport, qui ne sera plus à rendre pour hier mais pour avant-hier.

* Cahier de vacances 2010 – Article initialement publié le 14 septembre 2009