Chroniques ordinaires Humeurs

Vouloir

Vouloir, verbe du groupe comptant le plus d’irrégularités et remis au goût du jour à cette époque de l’année où chaque conversation commence par « pour Noël, je veux ».

Je veux être libre, indépendante et émancipée

A dire très vite, sans reprendre sa respiration. Comme quand je porte des cartons qui font 4 fois mon poids et que je me prends pour Xena la guerrière, les cuissardes en moins. Je sais manger les Kinder Surprise, monter la surprise, je suis bien capable d’ouvrir le carton qui emballe ma nouvelle bibliothèque et de la monter toute seule avec un cure-dents, trois vis, le manuel d’utilisation et mon testament rédigé parce que je ne sais pas encore si je vais réussir à fixer la dite bibliothèque et qu’elle risque à tout moment de me tomber sur les orteils.

Je veux un boulot passionnant, bien payé et œuvrer pour l’humanité

Petite, je voulais être vétérinaire, puis danseuse étoile, puis postière. Mais, ma vie étant riche en rebondissements, j’ai appris qu’une vache ne mettait pas bas toute seule comme une grande, la puberté m’a collée des hanches, des fesses et des seins qui font que je ne rentre plus dans mon tutu et Besancenot est passé par là. J’ai donc revu ma copie et me suis dirigée vers des études où à la question «qu’Est-ce que tu veux faire quand tu seras grande ?» je réponds « stagiaire, au moins ». Depuis, je me tâte franchement à devenir secrétaire médicale. Il y a des pubs à la télé, le sosie du Dr Ross travaille dans le bureau d’à côté, quand sa femme appellera je pourrai lui faire croire qu’il est parti déjeuner avec la bombasse du cabinet, j’ai des responsabilités, le transfert d’appel c’est toujours impressionnant les premières fois, et comme je bosse avec des médecins, j’ai un peu l’impression d’avoir la vie des patients entre mes mains quand je pose le téléphone.

Je veux perdre mes kilos en trop sans me délester de mes neurones

Cet été, c’était évident. Cosmo en parlait, ma mère mangeait de la soupe de courgettes instantanée (la soupe hein, pas les courgettes), il faisait tellement chaud que le Coca Light avait presque le goût du Coca rouge-le-vrai, le matin je n’avais aucun mal à me lever et je n’oubliais donc pas d’ « hydrater ma peau » à coup de crème anti-cellulite, et même toute habillée et sur les talons avec une furieuse envie de faire pipi, quand je me pesais, je ne trouvais pas le résultat si désastreux.

Aujourd’hui, en plein mois de décembre, l’idée de mincir est toujours présente, les jours pairs et impairs, à n’importe quelle stade de mon cycle menstruel, j’ai acheté la gamme complète de soupe en confettis avec des croûtons censés remplacer le pain, je ne pense plus qu’à ça, ne parle que de ça, découvre de nouveaux bourrelets, quand j’essaie un jean j’ai les cuisses rouges parce qu’il fait -15 dehors, trop chaud chez Promod et que je n’ai jamais supporté les écarts de température. Et j’appelle ma mère 4 fois par jour pour qu’elle me dise « mais non ma chériiie, ce ne sera pas toi la dinde à Noël ».

Bonne nouvelle, mon cadeau cette année c’est des vacances au ski, dans une doudoune qui ferait passer Kate Moss pour une amatrice de tartiflette. Au moins, sur les pistes, on est tous égaux.

Je veux arrêter de fumer

Et ce, depuis qu’un inconnu m’a dit, dans un élan de bienveillance, que fumer c’estpasbonpourlasanté. Premier réflexe, je lui ai rétorqué que j’étais étonnée parce qu’on m’avait toujours expliqué que c’était bourré d’oméga 3 et qu’à chaque inhalation de goudron, on sauvait des pingouins. C’était ça, où je lui cassais les dents. J’ai quand même sondé ma copine sportive et heureuse qui décèdera dans son sommeil, de vieillesse et non d‘un cancer du poumon, qui m’a dit que je pouvais y penser, les bonnes résolutions étant faites pour ça. Après avoir creusé un peu le sujet et arrêté une demie journée, je me suis rendue compte qu’à force d’envoyer bouler mes collègues, mes amis, mon chat, m’exciter sur le chauffeur de bus qui ne grille pas les feux rouges quand je lui demande… je pourrai vivre longtemps et en bonne santé, mais seule. Alors j’ai pris rendez-vous chez mon dentiste pour un détartrage complet et piqué des lingettes au citron pour les doigts chez le poissonnier.

Je veux savoir dire oui

Non, chez moi, c’est culturel. On me propose des frites, je dis non, en pensant très fort oui, puis en vole trois et plus si affinités. Il parait que l’esprit de contradiction est présent dans mon thème astral et j’ai beau avoir appelé Christine Haas pour lui demander comme je pouvais changer de signe astrologique, à chaque fois elle me répondait « cet appel vous sera facturé un bras en plus de vos cornées ». Je me suis résignée et j’ai continué à dire non.

Et il paraît que, quand on veut, on peut. Attends, à trois je rigole. 1, 2 …

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